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Maurice TOURNADE était dessinateur caricaturiste, mais aussi - et avant tout - journaliste. C'est à ce titre qu'il a suivi et commenté la vie culturelle tourangelle.
Tout particulièrement, les Fêtes Musicales en Touraine, qui lui ont permis de rencontrer les plus grands musiciens  de la scène classique, et en premier lieu le pianiste russe Sviatoslav Richter, initiateur du festival
en 1963...

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Les fêtes musicales en Touraine  

 

"Il y a des lieux où souffle l'esprit : c'est Maurice Barrès qui l'affirme.

 

Il y a Bayreuth hanté par le fantôme de Wagner. Il y a Salzbourg où survit le génie de Mozart... et quelques autres acropoles de l'Art offertes à la ferveur de fidèles pélerins. Sviatoslav Richter n'eut point besoin de ces hauts lieux sublimés par la légende ou ennoblis par la rumeur des âges. Il choisit dans la plus extraordinaire des parures, l'humble grange médiévale maintenue dans sa nature première, singulière et éternelle. Depuis des siècles les moissons s'y accumulent. Et depuis des siècles hulottes et chevêches y ont logé leurs nids.

Autrefois, comme l'a si bien rappelé Marcel Schneider, les mystères grecs se célébraient dans les bois et dans les champs ; afin de mieux allier la religion, la danse, la poésie et la musique. Il est donc bon qu'aujourd'hui une vieille demeure tourangelle vienne ranimer ces lointains et fabuleux souvenirs.

Depuis le fameux coup de foudre qui les révélèrent, cette beauté hors du temps et cette grandeur de tous les temps ont favorisé les rencontres d'exception.

C'est à Meslay, en effet, que Sviatoslav Richter et David Oïstrak - le roi David - ces deux géants venus de leur lointaine Russie - ont uni leurs talents pour la première fois.

C'est encore sous l'incomparable charpente de bois que Richter - le maître des lieux - et son invité Dietrich Fisher-Dieskau, le plus prestigieux des barytons, ont communié dans un véritable élan de foi.

C'est sur le rude sol de terre battue que Messiaen et Yvonne Loriod trouvèrent l'atmosphère le plus en accord avec leur inspiration mystique.

C'est dans ce décor dépouillé et exigeant, à cette robe de bure enrobant la musique, que le drame liturgique de Britten atteignit sa véritable dimension.

C'est enfin à Meslay, au milieu de tant d'autres instants privilégiés que Richter le Slave a lancé par deux fois son amical et fier défi à ce Benedetti-Michelangeli que l'on dit son égal latin.

Tant il est vrai qu'ici "le genius loci" des Anciens parle un langage plus clair et plus haut."

 

Maurice Tournade - 27 juin 1973

 

Photos NR Gérard Proust - Sylvain Knecht - Robert Langereux

"C'est là que je veux jouer."

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